Meurs pourriture communiste (ou comment les jeux sérieux sont chiants tellement on tue personne dedans…)

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httpv://www.youtube.com/watch?v=4myOpeR6_IU

Habituellement, je ne commence pas un billet par une vidéo, mais les vacances aidant, et la nostalgie étant à l’honneur suite à quelques échanges sur twitter et à mes sensations d’ado en découverte de l’amour, j’avais envie de placer un petit extrait culte.

La digression est courte, je l’accorde, je ferai mieux la prochaine fois. Alors, quel peut être le rapport de tout ça avec les jeux sérieux. Et bien un rapport énorme, je viens de finir Call Of Duty Black Ops. Et là, lecteur habitué à télérama, se dit, mais il est pas clair le type.

Alors toi qui lit un magazine bien pensant, je te dis, Call Of Duty Black Ops, c’est Le JEU, du moment et surtout, c’est un jeu qui a pour contexte la guerre froide (guerre froide! communiste! ça va mieux ou il te faut une ou deux citations). Bref, Le Jeu, se déroule pendant la guerre froide et le Jeu, aurait pu être un Serious Game. Mais il ne l’est pas et comme tout jeu, se trouve être un jeu pour ado retardé où on tue moults coco et tchongs (qui sont aussi coco), de façon atroce. Alors pourquoi n’est-il pas un Serious Game?

Tout d’abord je vais faire une grande digression (les habitués ne s’y perdront pas, les autres, vous pouvez retourner lire télé poche euh pardon, Télérama, de toute façon c’est pareil mais habillé). J’ai acheté ce jeu parce que je suis fan de la série depuis depuis l’épisode abordant le débarquement comme tout bon gamer (j’entends par là une personne qui joue à des jeux vidéos de façon déraisonnable, en y passant quelques heures de nuit au lieu de corriger ses copies). Euh, je reprends moi même ma digression en précisant que c’est une excuse nettement plus valable que de regarder Plus Belle la Vie. Donc j’achète cette splendeur, je joue, je tue habilement beaucoup de monde (et j’ai particulièrement adoré le couteau dans la gorge des vietnamiens sur des bateaux). Bref, je joue, je m’y croie un peu,  la musique aidant (on se serait cru dans la bonne vieille série l’Enfer du Devoir), et tout d’un coup, en pleine frénésie meurtrière, j’hurle, mais Putain, c’est un Serious Game.

Mon cerveau, comme tout humain, a des dysfonctionnement! et en bon prof d’histoire géo (enfin bon, je vais pas m’étaler sinon j’aurais mis exceptionnel), je me dis, mais avec tout ça, j’aurais bouclé la partie Guerre Froide du programme des mes troisièmes en deux temps trois mouvements. Pourquoi donc? ben dans Le Jeu, il y a tous les éléments de la guerre froide, les cinématiques font un petit rappel historique (pas très complet je l’accorde) mais pour qui dispose d’une petite chronologie de la chose, et bien il revit la guerre froide).

Alors, je vais en revenir à mon propos principal. Quel est le lien de tout cela avec les Serious Game. Et bien voilà, je vais tout vous dire.

Il y a peu, je lisais un article de  @pierretravers sur les jeux sérieux (A vous de le lire, je perds assez de temps en digressions inutiles). Et je me dis, il a bien raison le Pierre, car nous autres gamers, on sait bien que les jeux sérieux c’est du flan et que tout ça ça sert à faire de la thune en réalité. Parce qu’un jeu sérieux ça ne peux pas exister, sinon ce n’est pas un jeu. Alors là, y’a plein de gens qui vont dire il ne connaît pas si ou ça, il a pas lu untel ou untel (ça c’est sur, je n’ai pas lu untel ou untel, les articles sur les jeux sérieux faits par des pédagogues dépressifs pour lesquels le jeu s’arrête à Pong, je ne peux même pas les lire). Essayer donc de jouer à la bagarre sans coller un vrai coup de boule.

C’est bon, vous avez essayé? Alors! Ben c’est nul, on s’y croit pas! Parce que le critère d’un jeu c’est de s’y croire, de faire comme si. Et une bagarre sans le craquement de l’arcade sourcilière de l’adversaire, c’est pas crédible. Et ben les serious game c’est pareil! ON NE S’Y CROIT PAS! Et c’est là que le bât blesse.

Il y a en ce moment, une mode de parler de Serious Game à tout va, d’en faire une recette pédagogique miracle pour intéresser des élèves soit disant démotivés et intéressés par rien (parce qu’en réalité, ils sont intéressés par plein de choses, la façon de servir la soupe étant primordiale). Et, digression de plus, mais là certains sont habitués: Y’en a marre sur twitter du retwittage de trucs qui n’ont même pas été vus ni testés. Et intéressé des élèves avec des Serious Game, qui se révèlent aussi chiants qu’un cours magistral, et ben ça n’arrangera rien. Pourquoi, parce que l’essentiel de ce qui est présenté comme des serious game, c’est de la daube.

Tiens Cindy! On va t’intéresser aujourd’hui au développement durable avec ce splendide jeu qui va te permettre  de répondre à des questions comme si tu étais une abeille. « Mais Monsieur, on n’en sait rien de comment elles pensent les abeilles, alors comment je répondrais aux questions ». Ah Cindy, si tu savais que tu allais être exclue par une réponse si insolente (si le prof dit que c’est bien, C’EST BIEN même si ton prof il y connaît que-dalle aux jeux parce que son loisir c’est de lire des livres sur Napoléon). Et oui, répondre à des questions, ce n’est pas un jeu sérieux. Si vous voulez que Cindy se mette dans la peau d’une abeille, il faudrait faire un jeu où on est une abeille (et il faudrait que ce soit bien avec la possibilité de voler à pleine vitesse, d’éviter les prédateurs des abeilles,  de faire le travail d’une abeille et la possibilité de piquer les méchants quitte à en mourir, bon d’accord je digresse j’imaginais juste le jeu).

Voilà le problème des jeux sérieux. On vous colle un prétexte bidon pour vous vendre ‘(parce qu’il est bien question de vente puisqu’en réalité le marché est largement occupé par des sociétés à but très lucratif et même quand c’est gratuit, ce sont des sociétés qui se construisent une image ou veulent vendre un autre produit). Peu importe le prétexte, développement durable, connaissance du monde de l’entreprise (Les jeux sérieux pour les vieux sont parfois encore plus chiants), le fonctionnement est le même. On vous colle un prétexte, et on vous propose de « jouer » sur le thème. Et ben moi, j’appelle ça une fiche d’activité en classe ni plus ni moins (je donne un document et tu réponds à mes questions).

Et à mon humble avis, les seuls jeux vraiment sérieux, ce sont les jeux tout court. Parce que ceux là, ils ont été faits pour divertir et qu’ils ne pénalisent pas le gameplay qui est l’élément fondamental d’un jeu. Parce que moi sauver les dauphins en répondant à un questionnaire, ça me donne plutôt envie de savoir quel goût ça aurait le dauphin. Alors que quand je jouais à Echo the Dolphin (gamer depuis le CPC 464 tout comme bien d’autre et adepte de la sega megadrive pas comme ces lourds de chez nintendo) et bien j’aurais bien eu envie de les sauver moi les Dauphins. Et quand on veut me faire jouer le rôle d’un assureur et bien j’ai dû mal à m’y mettre parce qu’en réalité dans le jeu, l’assureur, il a une vie bien chiante (il matte pas sa secrétaire, il prend pas de pause, il fait pas un détour par micromania en rentrant du boulot).

Donc, à un moment, plutôt que de se demander comment faire des jeux pour apprendre, la bonne question serait peut être Comment utiliser des jeux pour apprendre. Parce que faire un bon jeu, ça coûte temps et argent, et un bon gameplay sans thune, sans moteur graphique de compet et sans une équipe complète, ça rend pas. A l’heure où le budget de production d’un jeu vidéo est équivalent à celui d’un grand film, peut-on s’amuser à bidouiller des trucs que l’on appellerait jeu? Peut-on faire un jeu sur la guerre du Vietnam sans tuer Victor Charlie ou même un GI (je suis assez open mais ça ne m’est pas arrivé depuis le jeu Vietcong en mode escarmouche, mais là je sens que je suis en train de perdre des lecteurs).

Et donc, tout naturellement, parce que dans ma tête mes discours sont toujours très clairs (oui dans la mienne, mais si vous en êtes arrivés là, c’est que ça doit pouvoir aller), j’en reviens à Call Of Duty Black Ops! Bien dommage que LE JEU soit interdit aux moins de 18 ans, parce qu’avec une chronologie bien sentie, un petit questionnaire et une petite discussion, et bien il aurait été un bon jeu sérieux.

Contrairement à Medal OF Honor, Tier 1, qui se contente, de te dire que si t’es afghan t’es qu’un gros méchant, Call Of Duty Black Ops, voudrait dire bien plus mais une fois plus comme le monde est réparti en cases bien définies, il restera un jeu de tir.

Alors arrêtez un peu de saoûler le monde avec de grandes digressions sur le jeu. Je ne dirai pas qu’il faut absolument être un gamer pour s’aventurer sur le sujet, je dirai juste qu’il faudrait un minimum savoir de quoi on parle. Un jeu sans Gameplay, ou avec un gameplay qui favorise tout sauf l’immersion, ce n’est plus un jeu depuis le temps de l’Amstrad. Alors si vous voulez aider Cindy, et bien faites des jeux qui soient d’abord des jeux, on verra après pour le côté serious! déjà en commençant par ce qui intéresse Cindy on aura fait un premier pas.

7 réflexions sur « Meurs pourriture communiste (ou comment les jeux sérieux sont chiants tellement on tue personne dedans…) »

  1. J’adore ton billet!
    En 2004, j’ai fait une séquence sur la seconde guerre mondiale (sur la question de brutalisation notamment où je traitais du cas très complexe des soldats) avec… Medal Of Honor, en première ligne. Avec la séquence du débarquement. Mes STG avaient adoré et avaient bien compris la précarité du soldat (physique, émotionnelle etc). Mes collègues beaucoup moins!!
    Je n’ai pas rententé l’expérience depuis, faute au matériel en fait. Car à part ramener ma GameCube pour passer les cinématiques, je ne pouvais guère faire installer une petite démo de COD 🙂
    Au passage, à propos de guerre froide, je vous conseille les cinématiques du jeu Freedom fighters qui part du postulat suivant : les russes remportent la guerre froide. Excellent en tous points, surtout pour étudier la novlangue soviétique.
    Bref, tu as parfaitement raison. Pour faire réfléchir les élèves sur les risques, je n’ai pas trouvé mieux que Sim City, avec lequel j’avais conduit un IDD Géographie / Musique (et oui, ce jeu est une merveille musicale sur le thème, variation sur un même thème).

    Bravo pour ce billet. Bon, je vais essayer de choper mon quatrième badge à Pokémon sur DS 🙂

  2. Bonjour, je viens de lire ton article et franchement je trouve ça navrant de réduire le jeu aux fps. Perso je me considère également comme un gamer depuis moult temps, j’ai commencé sur dragon 32 😉 c’est pour dire. Ta vision du jeu est très réductrice, et il y a plein de jeux que j’adore, genre course de voiture, simulation sportive foot ou encore des jeux de réflexion ou d’infiltration sur des plateformes diverses et variées (de la xbox360 à l’iphone en passant par la psp). Le plus drôle c’est ‘je dirai juste qu’il faudrait un minimum savoir de quoi on parle’, je trouve ça navrant. Chacun trouve son plaisir ou il veut et pas seulement en ‘tuant des méchants’, tu n’as pas la vérité absolue sur ce sujet, désolé. De plus, tous les jeux servent à faire de la thune comme tu dis, et pas seulement les serious game…

    • le sujet de l’article n’est pas le jeu vidéo mais les serious game dans le monde de l’éducation. Effectivement il est réducteur de ne citer qu’un fps, mais je ne pouvais pas citer tous les jeux auxquels je joue, et je me suis donc contenté de citer le dernier. mais j’aurais pu prendre n’importe lequel pour arriver à la même conclusion. J’avais même prévu au départ de partir d’un jeu en point and click d’aventure, qui n’a rien à voir avec un fps. Chacun trouve effectivement son plaisir où il le veut, là n’est pas mon propos! oui tous les jeux servent à faire de la thune, mais les jeux vidéos l’assument, les jeux sérieux ne l’assument pas!

  3. Salut Ticeman01, Je suis à 200% avec toi sur plusieurs points :
    1-La marchandisation des Sérious Games : les professionnels sont ominprésents. J’ai été plus que gêner lors d’une conférence sur cette question à Educatice. Il y avait 7 intervenants parmi lesquels un seul prof (sans compter Julien Alvarez). Et encore il venait présenter le futur jeu de la boîte qu’il a monté… Mise à part la représentante de la boîte à l’origine de 2025 ex-machina, les différents intervenants ont surtout insisté sur l’aspect technico-financier des projets et sur la chance que représentait l’appel à projet de NKM. Les chiffres balancés çà et là donnaient le vertige (jusque 800 000€ à moitié financés sur fonds publics)… Où sont les enseignants là-dedans ? Ben ils sont des conseillers techniques. « Mais si on peut s’en passer c’est mieux » dixit un chef d’entreprise le sourire aux lèvres. Ironie, cynisme, humour de mauvais goût, … ? Je ne sais pas… En tout cas, le thème de la conférence étant « peut-on faire des Sérious Games », j’ai bien compris que moi je ne devrais pas pouvoir…
    2-Il y a quelque chose qui me dérange dans ta vision de l’immersion. L’immersion est-elle concevable en histoire. Tous les auteurs qui se sont penchés sur la question (Veynes, Prost, Ricoeur, …) s’accordent sur l’unicité de l’expérience historique. Un jeu aussi complet soit-il, peut-il refaire vivre l’histoire ? La question qui se pose ici est la même que celle du récit : peut-on demander à un élève de se mettre à la place d’un personnage historique ? La question mérite d’être posée et mise à plat.
    On peut aussi imaginer demander à l’élève d’avoir un regard extérieur, celui de l’historien. Pour ma part j’espère avoir le temps de développer un jeu sur le modèle de « l’histoire dont vous êtes le héros » ; genre aujourd’hui bien malheureusement disparu. Cyrille Choppin a fait une tentative très intéressante là-dessus au sujet du sanctuaire de Delphes.
    3-Je joue également dps longtemps, mais les FPS ne sont pas ma tasse de thé… Il existe bien d’autres jeux possibles. Et certains modèles peuvent être transposable : un cluedo dans la Rome antique ou dans une abbaye, pour découvrir les lieux. C’est jouable dans tous les sens du terme. Bien cordialement.

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